Human Rights Watch demande à la Thaïlande de ne pas expulser les membres du groupe Bi-2 vers la Russie
PHUKET : L’agence internationale Human Rights Watch, dont le quartier général se trouve à New York, a demandé aux autorités thaïes de ne pas expulser vers la Russie les membres du groupe Bi-2, arrêtés à Phuket.
Les membres russes du groupe risquent des persécutions pour des critiques publiques du gouvernement russe si la Thaïlande les expulse vers la Russie, dit Human Rights Watch dans un communiqué du 30 Janvier.
“Les autorités thaïes doivent immédiatement libérer les membres de Bi-2 détenus et leur permettre de poursuivre leur route.” dit Elaine Pearson, directrice Asie de Human Rights Watch.
“En aucun cas ils ne doivent être expulsés vers la Russie, où ils risquent d’être arrêtés, ou pire, pour leurs critiques ouvertes du président russe Vladimir Putin et de la guerre en Ukraine.” a-t-elle ajouté.
La police thaïe a arrêté les membres du groupe car ils avaient organisé un concert sans les autorisations de travail appropriées, et les a transférés dans un centre de détention de l’immigration en attendant leur expulsion, indique le communiqué.
Parmi les sept membres du groupe Bi-2, il y a des citoyens russes ainsi que deux binationaux russes, un israélien et un australien.
Bi-2 a publié une déclaration sur Facebook dimanche 28 Janvier disant que la police thaïe avait arrêté le groupe le 24 Janvier, après un concert à Phuket. La police a prétendu que les membres du groupe n’avaient pas les permis légaux pour organiser des concerts en Thaïlande et a saisi leurs passeports.
Le 25 Janvier, après une nuit en détention, le tribunal leur a ordonné de payer une amende, ce que le groupe a fait le jour même.
Le groupe a indiqué sur Facebook que pendant ses interactions avec la police et le tribunal, ils n’avaient pas eu droit à un interprète, et n’ont pas compris les documents, en thaï, concernant leur affaire.
Les membres du groupe ont ensuite été transférés de Phuket vers un centre de détention de l’immigration à Bangkok, où ils attendent leur expulsion vers leurs pays d’origine.
DImanche sur Telegram, le groupe a expliqué “Maintenant nous sommes dans un centre de détention de la police de l’immigration à Phuket, en Thaïlande.”
“Le concert du 24 Janvier à Phuket était génial, mais après nous avons été arrêtés par la police : la raison de l’arrestation était que les documents n’avaient pas été correctement remplis par les organisateurs.
“Il est important de dire que tous les concerts de Bi-2 sont organisés en conformité avec les lois locales. L’an dernier nous avons fait plus de 60 concerts dans une trentaine de pays, dont deux en Thaïlande.
Naturellement, les derniers concerts à Pattaya et Phuket ont été organisés de manière officielle, avec des organisateurs locaux et en respectant toutes les obligations de sécurité.
Pendant leur première nuit de détention au poste de police, le groupe a expliqué “Tous les membres du groupe, des citoyens russes, israélien et australien, ont été arrêtés. Les chanteurs et fondateurs du groupe, Lyova et Shura, ne sont pas citoyens de la Fédération de Russie.
“Le lendemain, un procès a eu lieu : la décision d’une amende a été rendue, et elle a été payée sur le champ. Malheureusement, pendant le procès nous n’avons pas eu d’interprète, et nous n’avons pas eu l’opportunité de nous familiariser avec le contenu des documents de l’affaire.
“Ce n’est pas la fin de cette malheureuse histoire. Après le procès, nous avons été placés en détention par la police de l’immigration thaïe, sous la supervision de qui nous attendons une solution au problème de notre séjour dans le pays.
“Nous n’avons pas été inculpés d’autres charges. La situation et le bruit qui va autour suggère que des pressions extérieures ont joué un rôle significatif dans notre arrestation. Nous savons que les raisons de ces pressions sont notre créativité et notre opinion.” explique le groupe.
“Maintenant nous attendons notre transfert à Bangkok, où la question de notre séjour en Thaïlande pourrait enfin être résolue. Nous sommes en contact avec le Ministère des Affaires Étrangères israélien, et ses représentants en Thaïlande travaillent à résoudre notre situation. En même temps, le consul australien est venu dans notre lieu de détention mais n’a pas été autorisé à nous voir.
“Nous remercions nos fans pour leur soutien. Nous ne pouvons pas lutter contre la puissance de feu de la machine de propagande toxique, mais tant que ce sera possible nous vous tiendrons informés de ce qui nous arrive.” conclut le groupe.
Dans son communiqué, Human Rights Watch signale que le gouvernement russe considère le groupe comme une menace à la sécurité nationale. Après leur arrestation en Thaïlande, Maria Zakharova, porte-parole du Ministère des Affaires Etrangères russe, a déclaré que le groupe avait “sponsorisé le terrorisme” en condamnant la Russie et en soutenant publiquement l’Ukraine.
En Juillet 2022, un membre du parlement russe avait accusé les membres du groupe de “discréditer l’armée russe” et avait demandé au responsable du Service Fédéral de Sécurité d’ouvrir une enquête criminelle sur leur “position anti-russe” et leur tentatives de “discrédit”.
En Mai 2023, le Ministère de la Justice russe avait désigné le leader du groupe, Egor Bortnik (dont le nom de scène est Leva), un “agent étranger” pour “s’être opposé à l’opération militaire spéciale en Ukraine, et pour des déclarations négatives sur la Russie, ses citoyens et ses autorités”, a indiqué Human Rights Watch.
Dans ses déclarations sur Facebook, Bi-2 dit que “des pressions extérieures ont joué un rôle significatif dans leur arrestation. Nous savons que les raisons de ces pressions sont notre créativité et notre opinion”.
On ne sait pas si les autorités russes ont cherché le retour forcé des membres du groupe en Russie. Cependant, la répression en Russie atteignant de nouveaux sommets, les autorités russes ont pratiqué une répression transnationale ‒ abus contre des citoyens hors de la juridiction du gouvernement ‒ pour cibler des activistes et des personnes critiques du gouvernement à l’étranger par la violence et des actions illégales, dit Human Rights Watch.
En tant que membre de la Conventino des Nations Unies Contre la Torture et les autres Traitements ou Punitions Cruels, Inhumains ou Dégradant, la Thaïlande a l’obligation de ne pas expulser par la force des personnes qui risqueraient la torture si elles étaient expulsées, explique l’agence.
En Février 2023, le Thailand’s Act on Prevention and Suppression of Torture and Enforced Disappearances a codifié cette obligation dans la loi. La loi stipule que les autorités ne doivent pas “expulser, renvoyer ou extrader une personne vers un autre pays, s’ils y a des raisons de croire que cette personne serait en danger de subir de la torture, des traitement cruels, inhumains ou dégradantsi, ou de disparaitre.”
Le gouvernement thaï ne doit pas expulser les membres du groupe vers la Russie. S’ils sont expulsés par la force, ils risqueraient une arrestation arbitraire, de possibles mauvais traitements en détention, d’être poursuivis pour des motifs criminels, et un procès injuste, dit Human Rights Watch.
“Nous avons de graves inquiétudes que les autorités russes cherchent à punir ces artistes pour s’être prononcés contre le Kremlin et pour avoir critiqué la guerre de la Russie contre l’Ukraine.” dit Mme Pearson. “Le gouvernement thaï ne doit pas autoriser l’expulsion de ces activistes vers un endroit où ils risquent des persécutions.”
Article original : The Phuket News
https://www.thephuketnews.com/human-rights-watch-urges-thailand-not-to-deport-bi-2-band-members-to-russia-91109.php